Comprendre la diversité des aidants et leur rôle auprès de leurs proches

Définitions : qu’appelle-t-on un aidant ?

Le terme « aidant » recouvre toutes les personnes qui, en dehors de tout cadre professionnel ou salarié, viennent en aide à une personne de leur entourage en perte d’autonomie, de façon régulière et fréquente. Selon la Haute Autorité de Santé, il s’agit « de proches, parents, amis, voisins ». Cela va du soutien ponctuel (courses, démarches administratives, visite de courtoisie) à un engagement quotidien intense (toilette, présence la nuit, gestion des traitements).

En France, selon l’enquête INSEE 2021, plus de 9,3 millions de personnes apportent une forme d’aide à un proche en perte d’autonomie. Mais derrière ce chiffre se cachent des réalités très différentes.

Les familles : premiers aidants, une diversité de profils

La grande majorité des aidants sont issus du cercle familial. Mais tous ne vivent pas le même engagement, ni ne traversent les mêmes difficultés.

Les aidants conjoints

  • Âge souvent avancé : 39% des aidants sont le conjoint de la personne aidée (source : Baromètre Fondation April-Fondation Médéric Alzheimer 2022).
  • Prise en charge globale : Ils assurent fréquemment la coordination de tous les soins, la gestion du quotidien (ménage, repas, linge), et l’accompagnement psychologique, parfois au détriment de leur propre santé.
  • Grande précarité émotionnelle : En situation d’isolement, ils sont particulièrement exposés à l’épuisement, voire à la dépression (France Alzheimer).

Les parents aidants

  • Aidants d’enfants en situation de handicap : Les parents d’enfants ou d’adultes porteurs de handicap cumulent rôle de parent et de soignant, parfois à vie (environ 500 000 enfants concernés d’après Autisme France).
  • Gestion du parcours scolaire et social : Recherche d’établissements adaptés, interventions auprès des équipes éducatives, gestion des rendez-vous médicaux.
  • Lien avec les institutions : Démarches administratives souvent lourdes, suivi des dossiers MDPH, adaptation constante aux besoins de l’enfant.
  • Surcharge mentale : Selon une enquête APF France Handicap, 36% des parents aidants dorment moins de 5h par nuit, trop inquiets ou débordés.

Les enfants-adultes aidants

  • Appelés aussi “aidants descendants” : Ils accompagnent un parent vieillissant ou malade. En France, ils représentent près de 50% des aidants familiaux.
  • Conciliation vie pro/perso délicate : 62% continuent à travailler tout en accompagnant leur parent (source : Baromètre Fondation April 2022).
  • Multitude de tâches : Gestion des papiers, organisation des soins, adaptation du logement, veille au bien-être, soutien moral.
  • Fréquence et durée : En moyenne, un aidant accompagne son parent plus de 4 ans, et y consacre 22 heures par semaine (IPSOS — Fondation April 2022).

Frères, sœurs, amis, voisins aidants : l’entourage mobilisé

  • Aidants “indirects” ou secondaires : Ils interviennent souvent quand les proches directs ne sont pas disponibles, ou en relais pour soulager la famille principale.
  • Souvent invisibilisés : Cependant, ils jouent un rôle crucial : prise de nouvelles, “coup de main” ponctuel, surveillance à distance… Leur contribution augmente en zone rurale ou en cas d’éloignement familial.

Les aidants professionnels : un soutien structurant et complémentaire

Certains aidants sont salariés, formés et reconnus : auxiliaires de vie, aides-soignants, assistants de vie, accompagnants éducatifs, etc. Leur mission s’inscrit dans un cadre légal et rémunéré.

  • Auxiliaires de vie : Soutien au domicile, aide à la toilette, aux repas, stimulation cognitive, socialisation.
  • Aides-soignants : Soins d’hygiène et de confort, accompagnement dans les actes essentiels de la vie.
  • Éducateurs, ergothérapeutes : Soutien à l’autonomie, adaptation de l’environnement, travail éducatif individuel ou en groupe.
  • Techniciens de l’intervention sociale et familiale : Interviennent lors de situations de crise ou de maintien à domicile difficile.

Le secteur du domicile reste le principal lieu d’intervention : 73% des heures d’aide à la personne sont délivrées à domicile, contre 27% en institution ou hébergement (Drees, 2022).

Les aidants bénévoles

Beaucoup d’associations proposent un accompagnement non rémunéré : visites de bénévoles, aide administrative, ateliers pour rompre l’isolement, plateformes d’écoute. On estime à près de 2 millions le nombre de bénévoles impliqués auprès de personnes fragilisées en France.

  • Exemple : Les bénévoles d’accompagnement en soins palliatifs qui assurent présence, écoute, réconfort auprès des patients et de leur famille (source : France Assos Santé).
  • Bénévoles associatifs : Soutien lors d’ateliers mémoire, sorties collectives, formations pour aidants.

Quelques missions concrètes de l’aidant au quotidien

Les aidants réalisent des centaines de gestes chaque semaine, souvent dans l’ombre. Voici les missions les plus fréquentes :

  • Aide dans les actes essentiels : Lever, coucher, toilette, habillage, préparation ou aide aux repas, aide à la prise des médicaments, déplacements à l’intérieur et à l’extérieur du domicile.
  • Soutien psychologique et moral : Présence rassurante, écoute, partage des inquiétudes, gestion du stress et des angoisses du proche aidé.
  • Gestion administrative : Constitution et suivi de dossiers médicaux, demandes d’aides, paiement des factures, coordination avec les professionnels de santé.
  • Organisation médicale : Prise de rendez-vous, suivi des prescriptions et des traitements, gestion du matériel médical, adaptation du logement.
  • Préservation du lien social : Organisation de sorties, maintien des relations familiales ou amicales, stimulation de la communication, participation à des ateliers ou activités adaptées.

Les spécificités selon la situation de la personne aidée

Le rôle de l’aidant s’adapte aux besoins : l’aidant d’une personne âgée en perte d’autonomie ne fait pas tout à fait le même accompagnement que celui d’un enfant avec un handicap sévère. Voici les différences notables.

Type de situationMissions spécifiques de l’aidant
Personne âgée (maladie d’Alzheimer, perte d’autonomie physique…)
  • Sécurité du domicile (prévention des chutes, gestion des objets dangereux)
  • Stimulation cognitive (jeux, discussions, lecture)
  • Gestion de l’errance ou de la désorientation
Personne en situation de handicap moteur
  • Aide au transfert (lit, fauteuil, toilettes…)
  • Utilisation et entretien de matériel spécifique (lève-personne, verticalisateur…)
Enfant ou adulte avec handicap psychique/mental
  • Gestion de comportements difficiles, prévention des crises
  • Soin apporté à la structuration du temps et de l’espace
  • Accompagnement à l’apprentissage de l’autonomie
Personne malade (maladie chronique, cancer…)
  • Soutien à la gestion de la douleur, de la fatigue, des effets secondaires des traitements
  • Soutien moral et accompagnement lors des rendez-vous médicaux

Quels défis et quels besoins pour les aidants aujourd’hui ?

Prendre soin d’un proche est une aventure exigeante : il faut apprendre sur le tas, jongler avec l’émotion, la peur de mal faire, les démarches parfois opaques, et composer avec le manque de reconnaissance ou de relais. D’après le rapport 2023 de la Défenseure des droits, près de 20% des aidants déclarent avoir dû réduire ou arrêter leur activité professionnelle pour assumer leur rôle d’aidant.

Les principaux besoins exprimés par les aidants sont :

  • Être informé clairement sur les droits, les aides disponibles et leurs démarches
  • Être soulagé ponctuellement par des relais de professionnels ou de proches
  • Être soutenu moralement (groupes de parole, plateformes d’écoute, formations à la gestion du stress)
  • Bénéficier de temps de répit (accueils de jour, hébergements temporaires, aide financière)
  • Être reconnu dans leur expertise et leur expérience du quotidien

À ce titre, de nombreux dispositifs se développent : le “droit au répit” depuis la loi ASV (2015), la formation gratuite pour aidants via les CCAS ou associations spécialisées, l’émergence de « cafés des aidants »… Cependant, l’accès à ces solutions reste inégal selon les territoires.

Vers une meilleure considération des aidants : quelles avancées et perspectives ?

Aujourd’hui, la reconnaissance des rôles d’aidants progresse — mais beaucoup reste à faire pour limiter l’isolement et prévenir l’épuisement. La mise en place du “congé proche aidant”, le versement de l’Allocation Journalière du Proche Aidant (AJPA), ou encore les campagnes nationales de sensibilisation sont des pas importants. Les aidants sont et resteront des acteurs clés du maintien à domicile, de l’inclusion et du soutien social à tous les âges.

À chacun son histoire, son degré d’engagement, ses limites, mais tous les aidants partagent le même besoin : pouvoir accompagner dans la dignité, sans sacrifier leur santé ou leur vie personnelle. Mieux connaître la diversité des aidants, c’est faire progresser la reconnaissance collective et inspirer des solutions plus justes pour tous.

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