Proche aidant : définitions, réalités, et situations au quotidien

Comprendre qui est un proche aidant aujourd’hui

Quand parle-t-on de “proche aidant” ? Qui peut être reconnu officiellement comme tel ? Et dans quels moments de la vie ce rôle se manifeste-t-il ? Derrière ces questions se cachent des réalités très diverses, souvent loin des clichés. Être proche aidant aujourd’hui, ce n’est plus seulement accompagner un parent très âgé. C’est un engagement qui touche toutes les générations, s’exerce dans des configurations multiples et mobilise chaque année plus de onze millions de personnes en France, selon la Fondation April (2023).

Décrypter ce qu’englobe réellement le statut de proche aidant, dans la loi comme dans la vie, c'est mieux comprendre la portée de ce mot, trop souvent associé à l’invisibilité. Explorons ensemble les critères, petites différences et grandes évidences qui fondent cette reconnaissance.

Le proche aidant : une définition légale et humaine

En France, la notion d’aidant a longtemps avancé sans vraie définition officielle. Depuis quelques années, la loi lui donne un visage plus précis, en particulier via l’article L.113-1-3 du Code de l’Action Sociale et des Familles :

  • Un proche aidant est “une personne non professionnelle, qui vient en aide, de façon régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne d’une personne dépendante, en raison de l’âge, d’une maladie, d’une situation de handicap ou d’un accident”.

L’aide peut être de nature variée : aide matérielle (courses, ménage, soins), soutien moral (écoute, présence), veille administrative ou organisationnelle. Il n'est pas nécessaire d'habiter sous le même toit ni d’apporter une aide de manière exclusive.

Les proches aidants sont ainsi présents à tous les âges : soutien à un enfant porteur de handicap, conjoint d’un malade chronique, frère ou sœur d’une personne en situation de handicap, enfant adulte auprès d’un parent vieillissant… Les visages de l’aide sont multiples.

Aidant familial, aidant naturel… qui englobe-t-on vraiment ?

Le terme “proche aidant” se décline parfois sous différents noms : aidant familial, aidant naturel. Quelles subtilités ?

  • Aidant familial : membre de la famille (conjoint, parent, enfant, frère/sœur…) qui aide un proche.
  • Aidant naturel : personne qui n’est pas forcément de la famille, mais a un lien étroit avec la personne accompagnée (ami très proche, voisin, personne de confiance...).

Depuis la loi “ASV” (Adaptation de la société au vieillissement) de 2015, cette distinction tend à s’estomper dans les textes au profit d’une reconnaissance unique du rôle de proche aidant, qu’il soit familial ou non.

Combien sont-ils ? Portraits et chiffres clés

On estime entre 9 et 11 millions le nombre d’aidants en France (Baromètre Fondation April 2023, Association Française des Aidants, INSEE).

  • 58% sont des femmes.
  • Plus de 60% exercent une activité professionnelle en parallèle.
  • 45% des aidants ont moins de 50 ans.
  • Plus de 350 000 jeunes de moins de 25 ans sont aidants d’un proche malade ou en situation de handicap (Chiffres Jeunes Aidants Ensemble, 2023).

Ce rôle n’est donc pas réservé aux seuls retraités ou parents. De plus en plus de jeunes adultes, d’actifs, et même d’adolescents endossent la mission d’accompagner au quotidien un proche, parfois sans même avoir conscience d’être “aidant”.

Les situations où l’on devient proche aidant

Handicap et maladies chroniques

  • Enfance : accompagner un enfant porteur d’un handicap moteur ou mental, une maladie rare, ou des troubles envahissants du développement.
  • Adulte : soutien d’un conjoint ou ami atteint d’une maladie chronique (sclérose en plaques, cancer, diabète, troubles psychiatriques...), d’un handicap acquis ou de troubles de santé mentale.

Avancée en âge et dépendance

  • Prendre soin d’un parent vieillissant (perte d’autonomie, maladie d’Alzheimer, poly-pathologies…).
  • Porter assistance sur les actes de la vie courante : toilette, habillement, repas, gestion administrative, mobilité, stimulation cognitive.

Accidents de la vie et rééducation

  • Accompagner un proche après un accident, une hospitalisation, ou une perte soudaine d’autonomie.
  • Soutenir temporairement la réadaptation à domicile, organiser des soins de suite, mettre en place des aides techniques.

Maladies psychiatriques et addictions

  • Soutenir un proche souffrant de troubles psychiatriques, accompagner dans la durée les parcours de soins, prévenir la rupture de lien social.
  • Être présent dans la trajectoire de rétablissement face aux addictions, troubles du comportement alimentaires...

Quels critères pour être reconnu comme aidant ?

  • Amente de façon régulière et fréquente une aide sans professionnalisation.
  • Concerne la réalisation des actes de la vie quotidienne (gestion des repas, hygiène, déplacements, démarches administratives, présence réconfortante).
  • Intervention volontaire, en dehors du cadre professionnel (hors contrats d’aide à domicile financés).
  • Soutien d’une personne en situation de dépendance : en raison de l’âge, d’un handicap, d’une maladie, ou d’un accident grave.

Ce qui compte, ce n’est ni le “lien de sang”, ni la cohabitation, ni même le temps consacré chaque semaine, mais le soutien régulier et non rémunéré apporté à un proche en difficulté.

Des modèles familiaux et amicaux de l’aide très divers

Les situations d’aidance ne sont pas toutes “classiques”. On retrouve par exemple :

  • Des adolescents aidant un parent malade ou un frère porteur de troubles autistiques (voir le rapport “Jeunes Aidants Ensemble”, 2023).
  • Des conjoints qui, au fil de la maladie, basculent vers un rôle de soignant informel.
  • Des fratries solidaires qui se relaient auprès de leur parent très âgé.
  • Des amis, voisins, colocataires, qui endossent cette posture, notamment chez les publics isolés.

Personne ne prévoit de le devenir. L’aidance est souvent déclenchée par un événement soudain : diagnostic, chute, aggravation d’une maladie, hospitalisation.

Droits et reconnaissance des proches aidants en France

Depuis 2015, de nombreux dispositifs mettent en lumière ce rôle essentiel :

  • Possibilité d’obtenir le statut officiel auprès du médecin traitant ou via la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées), ce qui facilite la reconnaissance des droits.
  • Droit à un congé proche aidant (jusqu’à 3 mois renouvelables), permettant de s’absenter du travail pour s’occuper d’un proche en perte d’autonomie.
  • Accès à des plateformes de soutien, services de répit (accueil temporaire, relais à domicile…), cartes d’aide ou formations (www.aidants.fr, https://solidarites-sante.gouv.fr/).
  • Certaines communes et caisses de retraite offrent des accompagnements dédiés.

Être proche aidant sans le savoir : une réalité trop répandue

D’après le Baromètre 2023 Fondation April, près de 48% des aidants se disent “non informés de leur statut” ou ignorent qu’ils peuvent bénéficier de droits associés. Cela démontre la nécessité d’une information accessible, tournée vers les réalités concrètes du quotidien.

  • Plus on connaît ses droits, plus il est facile de prendre soin de soi et de préserver l’équilibre familial.
  • Oser rechercher de l’aide extérieure, s’appuyer sur les réseaux d’associations, s’accorder du répit : autant de pas essentiels, parfois entravés par la méconnaissance de ce que recouvre vraiment la notion de proche aidant.

Élargir la reconnaissance aujourd’hui : le regard des experts

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE, 2021) insiste sur l’urgence d’accorder davantage de visibilité à tous les aidants, y compris ceux intervenant auprès de publics jeunes, en situation de handicap léger, ou dans les troubles psychiques. Il s’agit de sortir d’une vision restreinte et de reconnaître la pluralité des parcours.

Des professionnels du médico-social notent que la frontière entre la “simple solidarité” et le statut d’aidant est parfois ténue, mais qu’il importe aujourd’hui de valoriser toutes les formes d’aide régulière, quelle qu’en soit l’intensité ou la fréquence.

Pour aller plus loin : comment faire valoir son statut ?

  • Se signaler auprès de son médecin, de la MDPH ou contacter des associations spécialisées.
  • Demander un accompagnement via des dispositifs départementaux (plateforme de répit, consultation psychologique pour aidants, ateliers d’information…).
  • Consulter le site officiel du gouvernement dédié aux aidants : www.monparcourshandicap.gouv.fr ou www.aidants.fr.

La reconnaissance du rôle de proche aidant a encore de beaux progrès à faire. Cependant, chaque jour, de plus en plus de personnes prennent conscience de leur place dans cette chaîne de solidarité. Les visages de l’aidance sont aussi nombreux que singuliers : ce qui compte, c’est que jamais un aidant ne se sente seul, ni invisible.

Sources : Fondation April Baromètre 2023, Association Française des Aidants, Conseil économique social et environnemental, Rapport Jeunes Aidants Ensemble 2023, INSEE, Code de l’action sociale et des familles.

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